LES MANOUVRIERS SELON VAUBAN

 

« Parmi le peuple, notamment celui de la campagne, il y a un très grand nombre de gens qui, ne faisant profession d'aucun métier en particulier, ne laissent pas d'en faire plusieurs très nécessaires et dont on ne saurait se passer. Tels sont ceux que nous appelons manouvriers, dont la plupart n'ayant que leurs bras, ou fort peu de choses au-delà, travaillent à la journée, ou par entreprise pour qui veut les employer. Ce sont eux qui font toutes les grandes besognes, comme de faucher, moissonner, battre à la grange, couper les bois, labourer les terres et les vignes, défricher ( ... ) faire ou relever les fossés, porter de la terre dans les vignes et ailleurs, servir les maçons et faire plusieurs autres ouvrages qui sont toutes rudes ou pénibles ( ... ) Pendant la fauchaison, la moisson ou les vendanges, ils gagnent d'assez bonnes journées ; mais il n'en est pas de même le reste de l'année. ( ... ) Je suppose que des 365 jours, il puisse en travailler 190 et gagner 9 sous par jour. Passons, 90 livres desquelles il faut ôter ce qu'il doit payer (les impôts) qui fera 6 livres et pour le sel de quatre personnes dont je suppose sa famille composée, 8 livres 16 sols. Il ne faut pas moins de dix setiers de blés, mesure de Paris, pour leur nourriture. Ce blé, moitié froment, moitié seigle viendra à 6 livres le setier, lequel fera 60 livres. Restera 15 livres 4 sols, sur quoi il faut que ce manouvrier paie le louage de sa maison et qu'il fournisse à tous les besoins de sa famille pendant une année. Ces 15 livres 4 sols ne le mèneront pas loin, à moins que son industrie ou quelque commerce ne remplisse les temps qu'il ne travaillera pas, et que sa femme contribue à la dépense par le travail de sa quenouille, la couture, le tricotage de bas ou la façon de dentelle, selon le pays ; par la culture d'un petit jardin, la nourriture de quelques volailles, et peut-être d'une vache, d'un cochon ou d'une chèvre pour les plus accommodés, qui donneront un peu de lait au moyen de quoi il puisse acheter quelque morceau de lard, et un peu de beurre ou d'huile pour se faire du potage. Et, si l'on y ajoute la culture de quelque petite pièce de terre, il sera difficile qu'il puisse subsister ; ou du moins, il sera réduit, lui et sa famille, à faire une très misérable chère. Et, si au lieu de deux enfants il en a quatre, ce sera encore pis, jusqu'à ce qu'ils soient en âge de gagner leur vie. »

 

VAUBAN« Projet d'une dîme royale» 1707.

 

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